Je veux des réponses [PV Lorelaï]

A peine la porte ouverte, Sarika remarqua que Lorelaï ne semblait pas vraiment ravie de sa présence...L'inverse était vraie également, mais son désir de réponses était plus fort. Alors, elle avait choisi d'ignorer la tenue de la louve...sortait elle tout juste du lit ? Ainsi que son expression et ses oreilles couchées en arrière.
Néanmoins, elle ne put rater la tenue de soubrette et surtout, le collier qui ornait toujours le cou de Lorelaï...Et cette vision la fit grimacer. Impossible de s'en empêcher au vu des souvenirs que cela faisait remonter.

- Tu devrais jeter ce collier, tu es une hybride libre maintenant...même si j'ai l'impression que tu en profites pour te promener un maximum. Et pour moi, ça se passe bien, c'est dur mais j'apprends beaucoup de choses !

Non, elle n'allait pas rentrer dans les détails. Cette hybride n'était plus son amie depuis bien longtemps et ne faisait partie du cirque que comme un otage...Alors non, elle n'allait certainement pas lui raconter ce qu'elle faisait de ses journées, notamment ce qui se passait en extérieur.
Posant les yeux sur son assiette, elle se rendit compte qu'elle était réellement affamée...mais la louve ne semblait pas prête de vouloir manger. Elle releva les yeux pour la fixer et le nouveau grondement de son estomac ne lui échappa pas...lui tirant un sourire sarcastique.

- Ne te plains pas, déjà je t'amène un plateau repas alors que j'aurais pu rester tranquille dans mon coin à dessiner tout en mangeant. Et non, rien à voir avec Sétith, je ne lui préparerai pas un bête repas qu'il mange presque tout les jours. Alors mange, tu as l'air d'avoir faim en plus ! Est-ce que tu te nourris au moins ?

Sarika ne savait pas si la santé de Lorelaï l'intéressait ou pas...mais la question était venue assez naturellement sur un léger ton de reproches. Surement qu'elle ne se nourrissait pas assez bien. En tout cas, elle, elle avait faim et n'allait pas rester indéfiniment devant son assiette sans rien faire à pars la regarder refroidir...Elle coupa alors un morceau de sa viande et commença à la mâcher. Elle prit bien tout son temps, laissant un long silence planer, puis finalement, une fois le bout avaler, elle reporta son attention sur la louve.

- Tu te rappelles la dernière fois sous le chapiteau ? Je te l'avais dis que je viendrais te voir...je veux des réponses, Lorelaï. Et je ne partirai pas sans les avoir eu. J'espère que je suis bien claire !

Sarika n'hésiterait pas à user de la force pour empêcher la louve de s'échapper mais pour la faire parler...Là, c'était une autre histoire. Et elle n'avait pas spécialement envie de mettre en pratique les cours de Thorne. Non vraiment, cela lui ferait trop mal, étrangement, de torturer son ancienne amie...même après tout le mal que cette dernière lui avait fait. Elle avait beau être rancunière, elle avait des limites.

- Je veux savoir, Lorelaï. Pourquoi ? Pourquoi ne m'as-tu pas aidé ? Pourquoi l'as-tu...laissé me faire tout ça ? Et au studio...pourquoi ?

Il lui était toujours difficile de parler du studio, même avec Sétith. Jusque là, en dehors des séances d'hypnoses, elle n'avait parlé que de sa grossesse et de quelques abus de la part de Vladimir...mais le studio, non elle n'avait jamais pu. Même là, sa voix s'était légèrement brisée sur la fin...Preuve que la blessure était toujours à vif.

Elle porta la main sur son collier quant Sarika lui en parla comme un réflexe. Si sa nonchalance pouvait laissait croire qu'elle s'en foutait il n'en était rien. Elle haussa les épaules et prit place sans arriver à dire la raison de ses éléments de son ancienne vie. La tenue, le collier. C'était à Vladimir. Comme elle. Il avait beau la tenir ici, elle restait à lui, qu'elle le veuille ou non. Et si elle fautait, ce serait son fils qui en pâtirait. Et puis, elle savait qu'une part d'elle se refusait à se tourner complètement vers la liberté. Une peur qui lui serrait les entrailles, ruinant ce sentiment de plénitude qu'elle ressentait à la vu de la ville étendu sous ses yeux. Mais ça, ça restait au fond d'elle, pas besoin de le dire car qu'est-ce que ça changerait après tout ?

Elle prit place, étonnée que Sarika vienne lui apportait à manger. Cela lui rappelait aussi d'autres souvenirs où les rôles étaient inversés. Pourtant elle se garda bien de les dires, restant méfiante jusqu'à ce qu'elle voit sa congénère se servir. Alors elle en fit de même, même si elle montra moins d'entrain que cette dernière, craignant encore et toujours un piège, une punition aussi fourbe que la façon de faire du cirque. Au fond Sétith lui avait permis de se méfier de tout ce qui venait d'eux.

"Je me débrouille pour la nourriture. je veux pas dépendre de vous. Je n'aime pas déjà être ici mais comme je n'ai pas le choix, je fais avec."

Une réponse simple qui expliquait aussi ses sorties nombreuses et longues. Elle s'éclipsait parfois des journées entières, partant avant le lever du jour et rentrant la nuit. Il faut dire qu'elle essayait aussi d'esquiver tous les membres du cirque, préférant être qu'une ombre, ne voulant pas être mêlé à leurs affaires, jugeant qu'elle avait déjà assez des siennes.

"Et puis ça évite que je vous gêne dans vos occupations."

La louve reprit un peu de nourriture, prenant le temps de tester la saveur, se tenant prête à tout recraché si un goût étrange se mêlait au reste. Mais rien donc elle se montra moins méfiante, observant sa congénère qui entrait enfin dans le vif du sujet. Là Lorelaï cessa de manger, achevant sa bouchée avant de soupirer. Elle se passa une main dans les cheveux après avoir reposer les couverts puis laissa son dos se poser contre le dossier. Son visage s'assombit quelques peu et elle lâcha.

"Va-y, que veux-tu savoir ?"

Son regard s'était assombrit mais elle n'esquivait pas Sarika, au contraire. Elle faisait face. Au fond elle savait qu'elle serait surement franche, quitte à être dure ou horrible, qu'importe. Vu ce qu'elle avait commis, les fioriture ou l'emballage de ses gestes ne les adouciraient pas, surtout pas face à celle qui les avait subie. Alors la louve prit une inspiration et écouta sa première question. Elle baissa les yeux, réfléchissant, se remémorant tout ce qui s'était fait. Sa voix se fit plus grave quand elle reprit la parole.

"Les ordres Sarika. Dès le premier jour il a voulu tout savoir sur toi. Tu étais sur écoute. Il voulait que je te fasse parler, que je t'ouvre... Je l'ai fais."

Ses mains se posèrent sur ses cuisses hors de vue de Sarika et elle reprit une de ses occupations. Ses ongles commencèrent à gratter ses chairs et ses plaies encore à vif alors qu'elle relevait les yeux sur la mouflonne. Pas de traces de larmes malgré sa voix qui semblait appeler une peine profonde. La louve devait se préserver et revenir sur tout cela n'était jamais bon. Elle voulait écourter la chose, passer ses sentiments sous silence en les gardant enterrer au fond d'elle. Aussi reprit-elle.

"Il voulait jouer avec toi de la pire façon qui soit. J'ignorais au début la drogue qu'il te donnait. Mais quand tu as accepté son marché, je savais que tu venais de faire le pire des choix qui était... Mais avec Vladimir tu penses toujours choisir ce qui te sauvera mais au final tu ne fais que couler un peu plus."

Les morceaux de sang séchés se décollaient au fur et à mesure qu'elle parlait, ses ongles se glissant dans les plaies, fouillant dedans comme pour en sortir ses souvenirs, ses sensations qui courraient sous sa peau comme un mal, un poison qui ne guérit jamais vraiment, continuant.

"T'aider était pas vraiment possible. Vladimir a toujours les rênes. Dans l'ombre. Te donner quelques moments de bonheurs avant ta chute était tout ce que je pouvais faire. Puis gérer ta chute aussi. Essayer de la ralentir, doser la souffrance, l'alléger sans pour autant l'ôter. Prendre la place de Vladimir pour certaines sévices pour que tu ais moins de... moins de douleurs. Valait mieux moi que lui.... Je pense."

Elle ferma les yeux, ses oreilles se couchant vraiment et malgré tout elle vit le brouillard emplirent ses yeux et soupira, relevant sa main en la fourrant dans sa manche pour s'essuyer les yeux, serrant la mâchoire, ravalant ses larmes, se sentant juste conne avant de reposer le regard sur Sarika, sa voix se faisant un peu plus vive, signe qu'elle se ressaisissait à sa façon, ne voulant pas sombrer dans ses souvenirs.

"Je... Oui je suis celle qui tenait la jeu face à toi. J'ai fait le choix de l'être, je ne le nie pas. A certains moments je... j'ai pu assouvir certaines vengeances vis à vis d'autres hybrides ou même homme qui... Mais j'ai toujours essayer de faire au mieux pour toi... Je sais c'est tellement.... tellement ridicule après tout ça. Je le sais. Mais après tout ce que j'ai vu Sarika... Tu t'en sors tellement bien, si tu savais..."

Sa voix s'étrangla en un rire ironique, nerveux. Elle revoyait la morte dans la morgue, les autres qui étaient disséqués vivant, à petit feu, morceau de chair par morceau de chair et elle voyait la mouflonne là, entière à un détail près. Certes minimiser l'horreur qu'elle avait vécu n'était peut être pas la meilleure des choses à faire mais la louve en avait vu tellement... Pouvait elle en plus lui dire qu'elle avait pris soin d'elle alors qu'elle avait subir les pires inepties ? Ce serait tellement ridicule, tellement pitoyable... Elle posa le regard sur la jeune femme face à elle et acheva :

"Cela n'excuses rien. Et je n'attends pas de pardon. J'ai fais des choix, comme toi. Pas les bons non plus il faut bien l'admettre..."

A la question sur la nourriture, Lorelaï resta très évasive. Sarika n'en avait pas beaucoup appris, si ce n'est une explication de voir si peu la louve au cirque...même si elle n'allait pas s'en plaindre. Moins elle la voyait,mieux elle se portait. Et pourtant, son besoin de savoir était plus fort. Elle la regarda alors longuement, son regard froid la fixait...et elle n'apprécia pas de sentir son estomac se soulever encore, de sentir la rage l'envahir, uniquement en la voyant. Elle devait vraiment apprendre à se contrôler, la regarder comme si elle n'était rien et à la considérer ainsi...Tout serait beaucoup plus simple.

- Pourtant, le cirque a les moyens de te fournir des repas. Même si ce n'est qu'un ballotin de produits divers posés dans un coin. Mais bon, j'ai bien d'autres à faire que de m'assurer que tu manges correctement.

Le ton était donné, elle n'était pas là pour s'assurer de la bonne santé de Lorelaï. Ce genre de choses étaient fini depuis bien longtemps, depuis que la louve l'avait entrainé en enfer. Elle n'était ici que pour ses propres besoins et ne s'en cachait pas.
Alors elle posa la fameuse question et la réponse ne mit pas longtemps à venir. Elle la fixa tout du long, la laissant finir son monologue, fronçant de plus en plus les sourcils. Jusqu'à entendre une remarque qui la choqua sur le coup.

- Je m'en sors tellement bien ? Est-ce que tu sais au moins par quoi je suis passée, ce fameux jour, quand la révolution m'a sorti du camion du centre ? Est-ce que tu sais ce que ça fait que de se retrouver encore une fois entourée d'inconnus qui disent te vouloir du bien ? Comme toi à l'époque...Et est-ce que tu sais ce que ça fait que d'accoucher, en pleine forêt, avec pour seul soutien, un hybride mâle que je ne connaissais pas ? Par contre, peut-être que tu sais ce que ça fait quand il n'y a que la haine et la rage qui te poussent à continuer comme si c'était des bouées...

Malgré sa volonté de rester calme, c'était la colère qui était ressorti d'un coup, brutalement. Une voix pleine de rage parce que non, elle ne s'en était pas bien sortie. Il y avait du mieux maintenant mais elle avait souffert chaque jour jusque là et souffrait encore.

- Mais pourquoi avoir obéi aussi facilement ? Je ne t'ai jamais vu douter, tenter de le convaincre de changer d'avis sur quelque chose !

Là-dessus, il y avait un doute, est-ce que la louve avait toujours obéi sans aucun doute ? Ou justement, en avait-elle ressenti mais savait mieux cacher ses sentiments qu'elle ? Cette option était parfaitement possible. D'ailleurs, en cet instant, la louve semblait neutre, alors que Sarika semblait proche d'exploser.

- J'aurais préféré, au contraire, que tu n'y prennes pas part. Vladimir est peut-être cruel mais j'ai vite compris à quoi m'attendre avec lui, même malgré la drogue qu'il me donnait. Mais toi...jamais je ne me serais attendue à ça de TA part. Chaque fois que tu allais plus loin, c'était comme une baffe car je n'imaginais pas ça de toi. Je te faisais confiance, je t'appréciais et c'est à cause de ça que c'était affreux. A cause de cette trahison et de ce sentiment de solitude que je ressentais. Maintenant, je le sais...tu n'es pas digne de confiance.

Sa voix s'était faite plus basse sur la fin, comme si c'était la conclusion de tout ce qui s'était passé entre elles deux. Mais c'était surtout parce que malgré ses dires, la souffrance était toujours là. Ses yeux remplient de larmes en étaient la preuve, elle avait fait confiance et avait été trahi, voila le pire. Ce quotidien avait été encore plus difficile à supporter car c'était sa propre amie qui l'y avait emmené, à chaque fois un peu plus loin.

"Je n'attends pas de toi que tu t'occupes de moi."

Ca avait le mérite d'être franc et clair. Elle n'attendait rien d'eux. On lui avait fait comprendre qu'elle ne servirait à rien alors elle n'allait pas leur demander de l'aide. De toute façon elle n'avait jamais réclamer d'aide de qui que ce soit. Les attentions, les câlins, les bisous, hors de questions. Pourtant malgré cette pensée, une personne passa au dessus et elle souffla comme pour chasser cette image d'homme à la crinière blanche.

*un idiot*

tenta-t-elle de se convaincre mentalement avant qu'enfin la discussion débute réellement avec la question de Sarika. La louve entama alors un monologue, ses mains se chargeant d'évacuer ce qu'elle ressentait à sa manière. Elle voyait que ces paroles ne plaisaient guère à Sarika mais pouvait-il en être autrement ? Y avait-il un moyen de dire les choses sans blesser l'autre ? Cet autre que tu as de toute manière humilié, torturé, détruit de la pire façon qui soit ? Sans doute pas ou tout du moins elle ignorait comment faire et n'avait pas le temps pour y réfléchir. Alors elle parlait, encore et encore, ses paroles débitant ce passé dont elle n'était guère fière mais qu'elle assumait pourtant....

Elle acheva son discours qui lui paru à la fois horriblement long et pourtant cruellement vide. Des faits, pas de sentiments, aucun. Un priorité pour elle, pour son mental. Faire abstraction. Un deuil et un moyen de pousser Sarika à plus de dégoût. Elle referma la bouche et laissa sa victime prendre la parole. Ses paroles étaient des coups qu'elle prenait sans un mot, ses yeux désormais secs, elle la regardait s'énerver, sa voix lourde de reproches, de douleurs mais la louve semblait y être imperméable. Pourtant sous la table ses ongles s'étaient enfoncés dans sa chairs, la maintenant droite face à l'orage. Elle encaissait en silence, déglutissant par moment sous certaines paroles, ses doigts augmentant ou desserrant leur prise dans la chair à vif comme pour réguler le compteur de ses émotions. La douleur, un bon moyen d'évacuer le trop plein.

Elle la laissa arriver à une conclusion claire et nette et relâcha alors sa prise sur son bras, posant ses prunelles vides sur Sarika. Désormais elle se souvenait, elle revoyait ces cauchemars et prit la parole d'une voix éteinte comme si ce qu'elle disait ne la concernait pas.

"A mon arrivée, il m'a attaché et mise à nue. Il m'a caressée avant de me descendre dans la morgue. Là au fond alors qu'il m'avait droguée, il sifflotait tranquillement, me portant sur son épaule. Il m'a balancé sur une table et j'ai vu une congénère morte.... Sans doute une autre. Une de celle qui n'a pas tenue"

Un sourire affligé étira ses lèvres à son souvenir. Elle ressentait toujours ce dégoût mêlé d'horreur comme au premier jour. Et cette peur viscérale de finir pareille alors qu'elle reprit.

"Même morte... même morte il la gardait, il s'en servait...."

La louve déglutit puis inspira en se passant une main sur le visage pour reprendre :

"Il l'a rangé dans un casier en lui murmurant qu'il allait s'occuper d'elle plus tard, que là c'était à mon tour d'y passer... La suite est simple. Il m'a violée jusqu'à ne plus en pouvoir alors que je ne pouvais rien faire. Je n'étais qu'un vulgaire sextoy pour lui, rien de plus. La seule chose que j'avais c'était mon casier dans sa morgue..."

Un frisson la parcourut et un voile passa sur ses yeux aux souvenirs de la morgue. C'était son enfer personnel. Le viol à côté n'était rien face à cette boite où il l'avait enfermée pendant presque un mois et où il venait l'entendre hurler jusqu'à perdre l'usage de sa voix. Elle avait eu l'impression de mourir encore et encore dans ce lieu clos, exigu. Ses doigts revinrent se fourrer dans ses plaies, les gratter pour la sortir de ses souvenirs alors qu'elle clignait des yeux, reportant le regard sur Sarika. Désormais elle était froide et son ton fut ferme quand elle reprit.

"Tu es passée par de multiples épreuves mais tu là, ici et maintenant. Tu te bats encore. Tu n'es pas dans cette foutue morgue comme la majorité de ceux et de celles qu'il a touché. Tu l'as vu disséqué un hybride vivant ? Lui arraché monceau de chair par monceau de chair avec lenteur et délectation ? Tu l'as vu s'en prendre à ceux que tu aimes ? Il t'a obligé à arracher le doigt d'une de tes enfants pour une maladresse ? Il a balancé un de tes proches dans sa boyeuse sous tes yeux pour t'apprendre à obéir ?....Tu as souffert et je le sais mieux que quiconque mais ne vient pas croire que tu es la seule à avoir souffert !"

Sa voix s'était emportée et elle s'était redressée, frappant la table de ses poings aux doigts ensanglantés. Elle sentait sa poitrine se serrer, reprenant son souffle et se détendit alors avant de se rassoir, la mâchoire crispée, les oreilles couchées. Il fallait qu'elle se calme, qu'elle se réfrène. Pourtant elle sentait son sang battre à ses oreilles et aurait voulu hurler et frapper, se défouler encore et encore. Mais elle ressentait aussi un poids sur elle, un de ceux qui vous fige, vous écrase peu à peu, inéluctablement. Elle reprit d'une voix soufflée, grave.

"Tu aurais préféré Vladimir.... Je peux t'assurer que tu l'aurais eu à ma place, tu ne serais plus ici pour me faire des reproches... Tu peux me haïr autant que tu veux, ça ne changera rien au fait que je ne regrette rien."

Elle plongea son regard dans celui de la mouflonne.

"Je te préfère vivante et battante, que morte et allongée sur sa table en métal dans sa morgue. Aujourd'hui tu peux faire quelque chose. Alors fais en sorte de ne pas avoir survécu pour rien."

La louve repoussa sa chaise et quitta sa place pour se diriger vers la salle de bain, attrapant ses vêtements au passage. Elle s'arrête à l'embrasure de la porte et se tourna à demi vers Sarika, posant un regard neutre sur elle.

"je dois m'habiller, as-tu autre chose à me balancer à la gueule ou pas ? Je laisse la porte ouverte sinon... "

Alors que Sarika répondait à Lorelaï, lui expliquant à quel point elle s'était sentie trahie et seule, elle se rendit compte que tout ceci lui avait coupé l'appétit. Rien d'étonnant puisqu'elles remuaient de douloureux souvenirs. Mais voila que la louve commençait à raconter ce qu'elle-même avait vécu entre les mains de ce monstre Vladimir. Visiblement, elle aussi avait vécu un calvaire à son arrivée, ce qui n'étonnait pas du tout la mouflonne. Les viols, classique, la morgue par contre...

Et puis voila que Lorelaï s'adressait à nouveau réellement à elle, se montrant glaciale, jusqu'à taper des poings sur la table. Ce qui la fit quelque peu sursauter, habituée à la voir stoïque. Finalement, la louve aussi éprouvait des émotions et semblait souffrir...ce qui au final ne changeait rien. A pars un peu de pitié, Sarika ne ressentait rien pour elle.

- Je ne considère pas être la seule à souffrir, je considère juste que TU n'aurais pas du t'en mêler. Et si j'avais accouché là-bas, crois-tu qu'il aurait hésité à se servir des enfants comme pression ? Jusqu'à mon sauvetage, il n'avait rien d'autre sous la main que moi-même pour faire pression, alors je n'avais peut-être pas de proches à faire souffrir mais ça m'a largement suffit. Tu n'as pas du te scier une corne pour te faire pardonner toi.

Et c'était affreusement douloureux. Et comme en plus, elle l'avait fait n'importe comment à l'époque, Sétith avait du faire en sorte de la poncer pour qu'elle ne se blesse plus avec...Une torture supplémentaire qu'elle avait bien du mal à oublier. Néanmoins, elle avait remarqué le sang sur les doigts de Lorelaï, comme quoi d'elles deux, c'était surement la louve qui en souffrait encore le plus. Elle la regarda se laver et se diriger vers la salle de bain.

- Non, j'ai trouvé ce que je cherchais en venant te voir. Effectivement, tu as souffert, j'ai souffert, d'autres ont souffert. Mais à la différence, c'est que je fais les efforts nécessaires pour m'en sortir. Tu es tellement pathétique Lorelaï, tu te plains, mais au final, tu restes prostrée dans tes souvenirs sans te battre. Mais tu sais quoi ? Je m'en fous royalement. Tu pourrais crever la bouche ouverte que ça ne me ferais rien. Moi je décide de tourner la page, de me tourner vers ma nouvelle vie et de la vivre à fond, je me fiche que tu restes derrière, bloquée dans tes souvenirs. Tu n'existes plus à mes yeux, tu n'es qu'une chose de mon passé que je vais oublier comme le reste.

Elle se leva à son tour, prit son plateau, laissant le reste sur la table. Elle sortit alors de la roulotte sans un regard pour Lorelaï. Elle avait obtenu les réponses qu'elle cherchait en venant la voir, et même si elle avait eu un petit espoir d'avoir peut-être...des excuses, des remords ? De retrouver la Lorelaï de l'époque, maintenant elle n'espérait plus rien de la louve. Elle l'ignorerait royalement désormais, comme si cette dernière n'existait pas. C'était sa façon à elle d'oublier le passé, de tourner la page.
Elle alla débarrasser son plateau et retourna à sa roulotte où elle se mit à dessiner. Dessiner avec rage pour extérioriser toute cette discussion.