Repliée dans le fond de ma cage, je regarde autour de moi les hybrides qui attendent leur prochain maître. Je ne peux qu'avoir de la pitié pour les miens, qui en sont réduits à attendre un humain. Comment peuvent - ils se réjouir d'en voir un entrer dans l'animalerie ? Ils n'apportent avec eux que servitude, douleur, trahison... Ils veulent nous réduire à néant, nous voir souffrir... Ou alors certains d'entre eux nous jugent comme des égaux... Ils ont tort, tellement tort. Parfois, je me demande jusqu'où la stupidité peut pousser les hommes. Croire que nous, les hybrides, dont le sang est mêlé à celui des animaux, pourront un jour les voir comme des égaux... Je me désole de savoir que peu d'hybrides pensent la même chose que moi, mais... Mais bon. Je ne peux pas simplement me lamenter dans le fond de cette cage. Ma main passe doucement dans le rose soyeux de mes cheveux. Je pense que je commence à m'habituer à leur couleur. En quelque sorte, ils me rappellent les couchers de soleil. Enfin, ce n'est pas comme si je pouvais en changer. Je n'ai pas l'argent pour aller chez le coiffeur, et les vendeurs ne me toucheront pas. A quoi bon prendre le temps de me rendre plus présentable quand ils doivent s'occuper d'hybrides bien plus luxueux ? L'un d'entre eux passe d'ailleurs devant ma cage et je me reprends. 《 Akuhe, tu ne dois pas te laisser abattre. Cette cage n'est qu'un obstacle à la liberté, et tu sais qu'avec assez de détermination, tu pourras en sortir. Pour cela, il suffit de te faire aimer. 》 Docile, je me redresse dans le fond de ma cage et offre un sourire doux au vendeur, tout en baissant légèrement le regard en marque de soumission. Je sais qu'ils aiment nous voir soumis, alors je fais de mon mieux pour paraître la plus douce, soumise et paisible des hybrides. Je sais qu'un jour, un client entrera et me prendra avec lui. A ce moment - là, je le servirai, comme on l'attend de moi, jusqu'à avoir assez de liberté et d'informations pour simplement... disparaître dans la nature. Je regarde les vêtements qu'on m'a donné ainsi que l'état général de mon corps. Depuis deux jours, on ne m'a pas nourri, et j'ai eu ma dernière toilette la semaine dernière... Heureusement, mon sweater pâle est toujours relativement intact, contrairement à mes pantalons, qui sont ouverts à plusieurs endroits. J'ai la chance, contrairement à certains hybrides, d'être encore habillée, alors je fais très attention à ces pièces de tissus. Mon corps, en dessous de ces vêtements, commence à subir les traces de cet emprisonnement. Mes jambes perdent de leur souplesse, mes muscles me font souffrir, mes bras sont de moins en moins forts... J'aimerais retrouver mes capacités d'avant, mais pour ça il faut que je sorte. Autour de moi, un brouhaha soudain se fait alors entendre, et j'en déduis qu'un humain est entré, alors je me relève, toute calme, et braque mon regard en direction de l'entrée. Oh, mea culpa.
Une humaine...
Les vendeurs l'accueillent, les hybrides s'agitent, et moi je me contente de la regarder, intéressée. Sera-t-elle la bonne ? Ma queue commence à faire ses allers retours entre droite et gauche, lentement, et j'adopte mon attitude de petit fennec en cage.
Un petit sourire gagne mes lèvres comme la femme s'approche de moi. Apparemment, j'ai attiré son attention... Je garde ce calme tranquille et docile qui me caractérise, bien que j'agite lentement ma queue, de manière à lui faire comprendre que j'apprécie sa présence. Les humains aiment être flattés, aiment se sentir importants. Avoir un chien qui agite la queue pour eux est quelque chose qu'ils apprécient. Ses questions ne me font ni chaud ni froid. J'ai l'habitude qu'on me questionne sur mes cheveux, et avec mon petit sourire et mon regard baissé, je lui répond doucement.
« Un caprice de mon ancien maître, mademoiselle. »
Elle s'approche de la cage, et commente sa taille, avant de m'en faire sortir. Être enfin capable de me tenir debout convenablement me fait du bien, bien que les douleurs dans mes muscles se fassent plus prononcées. J'essaie de me tenir droite en faisant fi de la douleur, et garde mon regard baissé ainsi que ce sourire soumis que je garde habituellement. Évidemment, comme beaucoup d'humains, elle me dépasse, de loin. En tant que fennec, je suis assez petite, et donc les humains peuvent me regarder de haut. Je remarque, d'ailleurs, que la demoiselle porte des talons haut, ce qui ne fait qu'accentuer sa taille. Les yeux baissés sur le sol, je ne vois pas sa main approcher ma tête, et retiens un mouvement de surprise quand elle touche mes oreilles. Je ne bouge pas, dans un premier temps, pour la laisser les caresser à sa guise. Elle me pose alors une question, une question à laquelle j'ai pensé pendant longtemps.
« Dis-moi Akuhe, comment te considères-tu ? Une humaine, un animal, les deux ? J'aimerai te connaitre d'avantage... »
Mon sourire prend une teinte plus sincère. Au moins, elle pose la question. Ça évitera, dans le futur, des moments gênants où elle voudrait me considérer comme une humaine. Pour cette question, je me permets de relever légèrement la tête, pour jeter un regard vers ces yeux bleus comme un ciel d'été. Elle ne semble pas avoir cette étincelle de sadisme qu'ont certains humains, mais je sais que ce n'est qu'un leurre. Les humains sont tous pareils.
« Je me considère comme un hybride. Je ne suis pas totalement animale, mais pas humaine non plus, et je vous serais redevable de ne pas me considérer comme telle. Si vous devez choisir entre ces deux étiquettes pour me définir, considérez-moi un fennec, et traitez-moi comme tel. »
Je quitte son regard et fait un mouvement de tête vers l'avant, pour lui montrer mon respect. Je lui suis redevable d'avoir posé la question, et je me sens plus légère maintenant qu'elle sait que je ne veux pas être traitée comme une humaine. Je dois avouer aimer toutes ces tâches qui me font courir d'un côté à l'autre, avoir des journées occupées... Je m'incline toujours devant ce côté travaillant qu'ont tant d'hybrides, et c'est une des raisons pourquoi j'aime me considérer comme une hybride.
« Malheureusement, mademoiselle, je ne saurais pas quoi vous dire d'autre sur moi. Cependant, si vous avez des questions, je me ferais un plaisir d'y répondre. »
Je m'incline de nouveau légèrement vers l'avant. Je ne pense pas que déblatérer des informations futiles sur moi soit la meilleure chose à faire. Au contraire, je préfère attendre ses questions, de manière à pouvoir être des plus précises dans mes réponses. Peut-être me trouvera-t-elle ennuyeuse, mais dans ce cas-là, je n'aurais qu'à raconter une petite anecdote sur ma vie avec mon ancien maître, et elle devrait apprécier. Enfin... Malheureusement, je ne la connais clairement pas encore assez pour savoir ce qu'elle apprécie ou non. Pour mon propre bien... Je vais devoir récolter le plus d'informations possibles, et le plus vite sera le mieux.
La jeune femme face à moi semblait avoir mal interprété mes paroles.. Ou alors elle entendait ce qui lui faisait plaisir... Ou alors je m'étais mal exprimée. Je revisitais mon speech dans ma tête en me notant mentalement de le changer, de manière à être plus précise sur le traitement que j'attendais. C'était vrai, après tout, que les humains ne pouvaient pas tout deviner. Alors, ne sachant pas trop si ses interrogations sont sincères ou si elles ont simplement pour but de me mettre mal, je pense à ma réponse. Je dois avouer que sa main qui grattouille mon oreille depuis tout à l'heure me dérange plus qu'autre chose, mais elle finit par la lâcher, au moment où elle termine ses questionnements, pour m'attraper par le menton. Ainsi, elle me force à relever la tête, et je suppose que c'est une façon de m'indiquer de la regarder dans les yeux, alors c'est ce que je fais. Je mets de côté ma haine, de manière à ce que rien ne transparaisse dans mon regard, et j'essaie d'avoir l'air douce comme un agneau. Même si ce n'est pas là mon animal. Elle continue son discours avant que je ne puisse répondre, et finis par simplement me lâcher. Autant pour le regard dans les yeux, je peux recommencer à regarder le sol, et voilà qui m'arrange. Quand elle a réellement fini, je me permets une réponse calme, bien que mon regard aille doucement effleurer le haut de ses joues, pour m'assurer que sa réaction n'est pas négative.
« Comme je le disais, je ne suis animale, ni humaine... Je suis hybride. Dans tous les cas, peu importe mon lit, mes habits, ma nourriture... Peu importe comment vous décidez de me traiter, j'obéirais à vos ordres, et je vous prie de me laisser participer aux tâches de la maison. Nous, les hybrides, avons été créés pour travailler, et c'est donc quelque chose que j'aime faire. Cependant, n'y voyez là aucune volonté de critique de ma part, mais je crains que mon corps ne puissent s'adapter à un mode d'alimentation entièrement animal. Je ne puis ni dépecer des proies, ni manger de la viande crue en grande quantité. »
Je finis là mes paroles, considérant que j'ai peut-être un peu trop parlé. Peut-être, aussi, l'ai-je contrarié, en lui rappelant insolemment mes propres dires. J'espère simplement qu'elle comprendra que ce n'était là qu'une volonté d'éclaircissement de ma part. En attendant sa réponse, mes pensées se dirigent lentement vers le centre de dressage. Là-bas, j'ai déjà été traitée comme un simple animal. On me nourrissait dans une gamelle, avec des croquettes... J'ai été malade plusieurs fois, mais mon organisme a finit par s'habituer, et je peux manger certaines choses que les humains seraient incapables de digérer, dû à mon statut de mixture génétique. Je ne sais pas si l'étincelle de nostalgie passe dans mes yeux au moment où l'image de Kogen s'impose à moi, mais je fais de mon mieux pour ne rien montrer. Le temps où mon ancien maître me laissait libre et où je retrouvais mes anciens frères et soeurs me manque. J'aimerais retourner à cette époque, peu importe les sacrifices auxquels je devais consentir tous les jours. J'essaie de chasser de moi cette tristesse inopportune, mais à défaut de vraiment réussir à la dégager, je réussis néanmoins à la cacher, et mon air docile s'en retrouve à peine perturbé. Enfin, s'il l'a été, j'en reprends bien vite le contrôle, et je souris de plus belle à la demoiselle. Peut-être suis-je un ennuie total pour elle ? Je prends une chance, et me permets de parler une nouvelle fois.
« Vraiment, si vous cherchez un simple fennec, je peux agir de la sorte. Il en sera fait selon vos désirs. »
C'était vrai, après tout. Chaque fois que j'y pense, je me dis que les humains doivent vraiment aimer être à la place qu'ils occupent, celle où ils donnent tous les ordres. Nous, hybrides, nous plaçons simplement en-dessous d'eux, assez malins pour nourrir leurs ambitions, sans jamais vraiment les comprendre ni les partager. Peut-être que je me trompe, et que certains d'entre nous les comprennent, mais j'espère que c'est faux. Nous ne devons pas nous abaisser aux humains, et c'est en gardant l'humilité à laquelle on nous force qu'on ne tombera jamais du mauvais côté de la médaille. Garder un mode de vie proche de la nature et de nos valeurs animales est le seul moyen de ne jamais se laisser tenter par l'avarice des hommes.
Je regarde la demoiselle, alors qu'elle déclare réfléchir. Elle n'est pas sûre de m'acheter, pas sûre que je sois la bonne, sans doute. Alors qu'elle s'éloigne, je me permets de l'observer. Elle a un mouvement et une allure que je dois avouer apprécier. Le balancement de ses hanches, de ses cheveux... Elle a une certaine prestance, qui attire mon respect. Au moins son apparence est respectable, et je sens déjà que probablement, son caractère ne sera pas des plus facile. Je me fie surtout au diction "Les apparences sont trompeuses" pour faire mon jugement. Après tout, elle n'a rien laissé filtrer qui me laisserait croire qu'elle est mauvaise, ou difficile, mais... Oui, les personnages charmants cachent toujours quelque chose. Je ne sais pas à quoi m'attendre. La demoiselle se balade dans les rayons, et moi je reste debout devant ma cage. Je n'ai pas vraiment le choix. Et puis... Et puis finalement elle revient, et se dirige vers la caisse en annonçant qu'elle me prend. L'humaine vendeuse m'attire vers le comptoir, et je me laisse simplement guider, calme et exemplaire. Je dois être parfaite. C'est ce qu'il faut. Pendant qu'elle signe les papiers, je me laisse surprendre à revisiter mes actions. Je n'aurais pas du donner autant d'explications, seulement lui dire de me considérer comme un animal, et accepter ce traitement. Oui, ça aurait été mieux, probablement. Pourtant, je suis un peu contente d'avoir eu quelqu'un pour entendre un peu de mon point de vue, étant donné que je n'ai pas eu le temps d'en parler avec Kogen, ni... avec personne, en fait. Lorsque la femme a fini, elle paie, puis se tourne vers moi. Dans ses mains, un collier aussi rose que mes cheveux et avec de la fourrure blanche. Je ne sais pas trop ce que j'en pense, mais je la laisse me le mettre au cou sans rien dire. La sensation d'avoir un collier, je la connais, mais elle me surprend encore une fois. Cette pression contre ma gorge, qui obstrue imperceptiblement la respiration... Pendant quelques secondes, j'ai l'impression d'étouffer, puis la sensation se fait plus supportable, puis omni-présente. Je sais que bientôt, je m'y serais habituée, et cela ne me dérangera plus du tout. Ma nouvelle maîtresse me présente alors quelque chose, juste devant mon visage, et je renifle par réflexe. Une friandise. Docile, je la prend dans ma bouche, et reste un moment indécise. C'est un peu comme des croquettes, avec cette texture indescriptible, mais avec un goût plus riche. Sans que je puisse dire "aimer ça", les saveurs réveillent le petit prédateur en moi, et j'apprécie la sensation de me sentir proche de mon animal. Dans un premier temps, je ne sais pas si je dois la remercier... Puis je me dis que je me dois d'être une bonne fille.
« C'est... bon. Merci beaucoup. »
Je manque de grimacer à l'hésitation involontaire devant l'adjectif. Je ne savais sincèrement pas quel mot utiliser pour décrire ce goût, mais "bon" m'a semblé le plus approprié. La femme m'ouvre la porte de l'animalerie et me laisse sortir. Bien sûr, même si l'appel de la liberté se fait fort, je me dis que c'est le pire moment pour commencer à courir. Alors je la suis docilement, la tête légèrement inclinée. Quand elle me dit son nom, je le fais rouler silencieusement contre ma langue, comme pour l'apprivoiser. Je ne le dirais probablement pas souvent, mais pour moi... Les noms sont quelque chose d'important. Les noms sont ce qui marque mon âme en premier. Je pourrais donner les noms de beaucoup de personnes que j'ai rencontré, et pour moi, cette information importante ne doit jamais s'oublier. Franciska. Comme elle me demande de l'appeler comme bon me semble, je me dis que peut-être... Peut-être que je ne dois pas faire de trop grandes démonstrations. Quelque chose de bref, de simple... Mais son nom serait trop familier. Alors j'y vais avec ce qui me semble le plus naturel.
« Très bien, Maîtresse. »
Après tout, c'est ce qu'elle est pour moi, non ? Sa main se posa alors sur la poignée de sa voiture, et je m'arrête près d'elle. Ça y est. Je suis... Adoptée.
Adoptée...
J'espère simplement que rien ne se passera comme avec mon ancien maître... Et que je pourrais m'enfuir très vite.
Je m'assois à l'intérieur de la voiture, docile comme un agneau, et je la laisse m'attacher. Sa voiture est... je ne sais pas. J'aime bien en tout cas, c'est confortable, et même si c'est exigu, c'est toujours plus agréable que ma cage. Avec cette même allure qu'elle a quand elle marche, Franciska passe un doigt sous mon collier, puis le desserre d'un trou. Le changement est immédiat, bien que je ne sois toujours pas une grande fan de la sensation d'avoir un truc autour du cou. Pas que ce soit toujours trop serré ou quoi... seulement c'est quelque chose de particulier à quoi, en tant qu'hybride, il faut s'adapter. Ma maîtresse me tapote la tête, comme si elle était fière -de moi ou d'elle même ?- d'avoir adapté la taille de l'accessoire. Je ne sais pas trop comment prendre cette marque... d'affection ? Alors je me contente de subir et de faire légèrement aller Ma queue, même si c'est plus de consternation que de joie. Je dois m'avouer un peu perdue. Elle n'est pas comme ces gens qui viennent et qui posent dès le début des bases, des règles, des contraintes... Elle ne m'a d'ailleurs encore rien fait de mauvais... Alors je ne sais pas trop comment réagir. Pendant que je cherche un peu comment approcher tous ces événements, Franciska m'interpelle. Nous passerons dans une petite boutique avant de rentrer, histoire d'acheter des accessoires. Je ne sais pas de quoi elle parle, mais j'espère que ce ne sera pas trop encombrant. Ma maîtresse décide alors, une nouvelle fois, de surmonter le volume très bas de la radio pour s'adresser à moi. Pourtant, cette fois, ce n'est pas un ordre.
《 Ça te dirait un petit jeu ? Rien de très compliqué, mais assez constructif pour commencer à se connaître toutes les deux ? Nous allons nous poser des questions l'une après l'autre, et allons-y répondre le plus sincèrement possible, si nous n'avons pas envie de répondre à la question, un petit gage... 》
Mes oreilles, à l'annonce du mot jeu, se sont redressées. J'ai toujours aimé jouer. Je sais que les humains ont parfois une conception étrange de ce mot, mais pour moi il rallume de bon souvenirs. Au centre, parfois, ils nous donnaient des balles. Avec les autres hybrides félin, on s'amusait à la faire rebondir partout et à courir après. C'était drôle, agréable, innocent. Alors évidemment, même si son jeu me semble étrange et que la notion de gage me fait un peu peur... je me dis que ça ne peut pas être si désagréable. Oreilles dressées, je l'écoute avec la plus grande attention pendant qu'elle pose sa première question. Puis j'ai un mouvement de recul très lent, qui marque mon incompréhension.
Zoophilie.
J'ai déjà entendu ce mot au centre. Il désigne des relations sexuelles entre un humain et un animal. Si c'est bien ça, alors ma réponse est directe. Enfin, dès que j'ai compris le sens du mot, je donne ma réponse à ma maîtresse.
《 Assurément que non. Les hybrides ne sont peut être pas humains, mais pas animaux non plus, et beaucoup ressentent des émotions proches de celles des humains. Alors non. 》
J'ai envie de rajouter que, cependant, ça reste du viol si l'hybride n'est pas consentant, mais je m'abstiens. Après tout, ce n'est pas à moi à faire la morale. Pourtant... Ayant appris ce mot "viol" dans un contexte personnel, je ne peux m'empêcher d'une certaine rancoeur envers Franciska, que je décide de tout de suite élucider. Dans l'intonation de ma voix, je ne peux m'empêcher de laisser passer un peu de ma haine des humains, et mon visage se crispe un peu.
《 À mon tour, alors... 》Je prends une grande inspiration. 《 Était - il... Ou elle... consentant ? 》
Je reprends le contrôle des traits de mon visage, puis offre un petit sourire innocent à ma maîtresse. J'aurais sans doute à me faire pardonner pour une question aussi indiscrète, mais n'est ce pas le jeu ?
Je ne peux empêcher mes oreilles de frissonner de soulagement, comme ma queue essaie doucement de battre derrière moi, bloquée par le siège. Elle n'est pas de ces monstres. Enfin, elle reste humaine, mais au moins... au moins l'hybride était consentant. Je ne sais pas pourquoi je suis si soulagée. Peut être qu'au fond de moi, j'espérais qu'elle ne soit pas de ceux - là... Peut-être que je suis une stupide optimiste et que je chercher encore le bien. Wow, ça m'arracherait presque un rire. Ma queue arrête de remuer et mes oreilles se rabaissent doucement comme la voiture s'arrête. Nous sommes donc au magasin d'accessoire. Je me demande ce qu'elle veut bien acheter... Avant de sortir, pourtant, elle se tourne vers moi et attrape mon menton entre ses doigts. Elle doit bien aimer faire ça...
《 Est-ce que tu as peur que j'abuse sexuellement de toi ? 》
Je la regarde dans les yeux, et mon sourire disparaît de nouveau, pour quelque chose entre le sérieux et la nostalgie. Pendant un temps, oui, ça me faisait peur. Maintenant, j'ai compris que ce genre de choses sont l'un des poids que l'on doit porter, nous, hybrides. Alors je n'ai plus peur. Je n'aime pas le concept, et je ne comprends pas comment on peut y prendre du plaisir, mais je n'ai plus peur.
《 Non. Ça ne me fait plus peur. 》
Honnêtement... Je ne sais pas qui j'essaie de convaincre. Elle ? Ou moi ? Elle me relâche pourtant, satisfaite, et nous sortons de la voiture. Le magasin a l'air sympathique, avec pleins de trucs pour les hybrides. Je souris en voyant ma maîtresse prendre des produits pour la fourrure, et caresse inconsciemment la naissance de ma poitrine, par réflexe, pour sentir ma fourrure sous mes doigts. Ce n'est pas épais, à peine un fin duvet, mais ça fait partie de moi. Franciska se tourne vers moi, et -je ne m'y attendais pas- me demande si quelque chose me ferait plaisir. Pendant un moment, je considère que cette question fasse partie du jeu, mais ça ne doit pas être ça. Alors je regarde autour, un peu détachée. Je n'aime pas particulièrement les jolies choses, ni la nourriture... Puis mon regard accroche quelque chose, que je ne lâche plus. Mon intérêt a été piqué, je dois l'admettre.
Un lazer.
Ça va sonner cliché, mais ces petits points rouges m'ont toujours fascinée. Même si je comprends comment ça marche, ça réveille un instinct au fond de moi, et j'aime me sentir plus animale. Même si c'est pour courir après un stupide lazer. Au début, je reste un moment interdite, ne sachant pas trop comment lui faire part de mon intérêt, puis je baisse les yeux.
《 J'aime beaucoup les lazers... 》
Je sais que baisser les yeux et faire passer une demande sous une autre forme que "Est-ce que je peux" marche toujours mieux avec les humains. Alors je prends mon attitude docile, et j'espère que ça passera. Pourtant, je me sens un peu obligée de justifier ce goût étrange.
《 Pour être franche, j'ai toujours aimé les jouets... 》
Après cette déclaration, je retourne dans mon petit silence soumis. J'espère qu'elle ne m'en voudra pas de cette insolence.
Je frissonne quand le souffle de ma maîtresse passe tout près de mon oreille, et je retiens les mouvements embêtés de ma queue. Parfois, si ce n'est pas tout le temps, ma queue exprime sans mon accord les sentiments qui ma traversent, et je dois l contrôler. Heureusement, contrairement à certains de mes congénères, j'ai un contrôle parfait de ma queue et peut la bouger -comme l'immobiliser- à ma guise. À la question de ma maîtresse, puis à son... ordre ? Je ne sais pas trop quoi répondre. Elle veut que j'arrête de baisser les yeux et de me montrer soumise ? Et puis quoi encore ? Elle veut que je lui crache au visage ma haine de l'être humain ? Ce serait drôle si c'était le cas. Du moins, je trouverais cela assez particulier. Je soupire comme Franciska s'éloigne, restant un moment immobile, puis je la suis docilement. Après quelques minutes de sélection de produits, d'accessoires et de jouets -dont un laser-, ma maîtresse s'arrête devant une peluche représentant un fennec.
« Tu veux une peluche ? »
Je reste interdite un moment. Une peluche ? Vraiment ? En réalité, la dernière peluche que j'ai eu remonte à... tellement longtemps. Alors, oui, au fond je la veux bien, cette peluche. Pour une fois, je ne me sens pas mal de l'admettre, et comme ma maîtresse me l'a demandé, je la regarde dans les yeux quand je lui souris.
« J'aimerais beaucoup. Merci. »
Est-elle satisfaite de ma prestation ? Pense-t-elle que mon attitude est meilleure maintenant ? J'espère, parce que c'est bien la première fois qu'un maître me demande d'arrêter d'adopter une attitude soumise. Enfin, ce n'est pas non plus incroyablement gentil de sa part. Peut-être qu'elle s'attend à ce que je me comporte en vrai animal. Je devrais peut-être commencer à explorer le magasin de mon propre chef ? Je me résigne à ne rien faire de la sorte, pour ne pas étirer la patience de ma pauvre maîtresse, et me contente de lui coller aux basques, jusqu'à ce que nous soyons de retour dans la voiture. Elle baille. Hm. Elle est fatigué ? C'est sûr que les événements importants ont tendance à épuiser les gens. Je suis moi-même victime de la fatigue. Je ne veux pas totalement l'avouer, mais je dois admettre que j'ai hâte que nous soyons rentrées... Histoire de me faire un petit coin dans le lit, ou le panier, qu'elle m'aura assigné. Roulée en boule... La peluche entre les pattes. Et puis, je commence à avoir mal aux joues. Garder mon sourire est de plus en plus difficile. J'ai hâte de pouvoir dormir, pour reposer mon visage.
« C'était à ton tour de poser une question, non ? »
Je sursaute à la question, tellement plongée dans mes pensées que j'ai perdu trace de la réalité. L'anxiété passe au travers de mes oreilles et de ma queue, qui s'hérisse soudainement, puis je reprends le contrôle de moi-même. La fatigue, la sous-nutrition, supporter la saleté, l'immobilité, les douleurs musculaires... Tout ça me donne de la difficulté à opérer normalement. Pourtant, je réponds à ma maîtresse avec le plus grand des naturels.
« Avez-vous eu d'autres hybrides ? »
Voilà, une question facile, qui me permets de me détendre. Sincèrement, peu importe qu'elle en ai eu ou non... Je n'en ai pas grand-chose à faire. J'ai, dans ma tête, une petite liste d'autres questions que je pourrais lui poser. Des questions faciles, pour me donner une vue d'ensemble du personnage. Son travail, ses loisirs, sa famille... Des choses basiques que j'ai appris en écoutant des conversations d'humains. Je pourrais la questionner sur le dernier livre qu'elle a lu, ou le dernier film qu'elle a vu, même si je n'y connais rien. Oui, ce jeu est facile.