J'ai toujours rêvé de vous rencontrer, Monsieur le Monstre

La belle sirène s'ennuyait énormément dans ce petit aquarium. Elle rêvait de pouvoir manger autre chose que de simple petit poisson lambda… Elle voulait des mammifères, des reptiles ou même des carpes en guise de repas ! Qu'elle puise nager tranquillement, parce qu'actuellement, sa nageoire était totalement engourdie dans un espace si restreint. Et puis elle n'aimait pas le regard du vendeur de l'animalerie où elle se trouvait, il avait l'air prêt à lui sauter dessus ou bien la dévorer. Quoi que… Il regardait souvent sa fiche sur la vitre et il repartait après avoir lancé un regard de dégoût. Et bien, quoi ? Halala, les humains ne comprenaient rien au goût de dévorer un de ses semblables, à la beauté de la taxidermie, les succulents cris de douleur et à la magnificence d'un corps gisant sur le sol. Seuls les êtres exceptionnels pouvaient comprendre ce qu'elle ressentait, alors, oui, ça ne courrait pas les rues.

Un soir, elle s'ennuyait à mourir… Ne trouvant plus aucune occupation après avoir lu toutes les fiches sur chaque cage des hybrides enfermé ici comme elle. Elle décida donc de faire un acte révolutionnaire. Le haut de son mini aquarium était ouvert, le gérant pensait qu'elle ne pouvait pas vivre hors de l'eau, quel naïf. La carpe se glissa donc hors de son bocal, elle regarda l'heure sur la pendule qui indiquait que c'était la pause du midi et donc que le magasin était fermé. Le vendeur devait être dans la pièce à côté… Parfait. Elle s'allongea au sol et se mit à crier en faisant semblant de suffoquer. Une seconde plus tard, l'humain arriva, paniqué et se précipita vers elle. Fujiko se laissa porter jusqu'à son lieu de vie depuis quelques jours et avant que le marchand la lâche, elle l'emporta avec elle dans l'eau, l'empêchant de remonter à la surface. La sirène était une bonne comédienne, non ? Elle avait réussi à tuer celui qui devait son vendre, alors qu'il connaissait déjà tout ce qu'elle savait faire. Idiot.

Après son magnifique meurtre, elle ressortit de sa prison en allant vers le bureau du gérant, volant le trousseau de clefs et ouvrant les portes de tous les hybrides enfermés. La moitié d'entre eux avait prit la fuite sans demander leurs restes. Mais un hybride cheval s'arrêta devant elle en la regardant. Oui, elle était la seule assise à ne pas fuir.

-Pourquoi tu restes ici ? Le cheval montra son dos avant de reprendre. Je peux te porter pour te permettre de fuir.
-C'est très gentil…Commença alors Fujiko d'un air des plus radieux. Mais j'attends quelqu'un. Fuie, ne m'attends pas.

D'abord perplexe puis résigné, l'hybride la remercia avant de partir en courant. Qu'attendait-elle vraiment ? Les rabatteurs. Pourquoi ? Elle avait entendu parler d'un humain aussi horrible qu'elle qui n'était que le gérant du camp de dressage, Vladimir Gribov.

Les agents de terrains ne tardaient pas à arriver dans l'animalerie, après avoir attrapé deux trois hybrides avant de venir, ne pouvaient que constater l'horreur qui se présentait devant eux. La carpe avait fini par sortir le marchand de l'eau et avait commencé à le manger tranquillement. En voyant ce groupe d'humains, elle s’essuya sa bouche en posant les couverts qu'elle avait trouvés dans la pièce à côté, se tournant vers eux avec le plus beau sourire qu'elle puise faire.

-Oh. Je vous attendais…Avec grâce, elle tendit ses deux poignets et regarda le plafond pour montrer son cou. Vous pouvez m'emmener, comme d'habitude.

Elle fit un léger rire avant de se faire attacher, certains rabatteurs du groupe la connaissaient déjà parce qu'il l'avait attrapé plusieurs fois avant de l'envoyer ici. Écœurés de cette scène, ils décideraient enfin à appeler ce très cher Vladimir pour prévenir l'arriver de plusieurs hybrides, dont elle, où ils firent un long récit sur ses actes et à qu'elle point elle était dangereuse. Cela la fit rire, ce qui pouvait sûrement s'entendre à travers le combiné.

Jetée comme un vulgaire déchet dans un camion sale, elle soupira en enlevant la poussière et la boue qu'elle avait récupérée en se faisant traîner dans un filet jusqu'ici. Du moins, elle essayait. Quelle bande de brutes, quoi que… Ça ne la gênait pas tellement. Mais quand même… Ce n'était pas un chien, ils n'avaient pas besoin de lui mettre une muselière ! Ce qu'elle voulait, c'était allé au centre de dressage donc elle n'allait pas s'enfuir ni les mordre, ils n'avaient pas à s'inquiéter pour ça. De plus, elle était incapable de bouger les bras et quand le véhicule faisait un virage, elle roulait sur le côté. Et dire qu'elle s'était fait belle pour pouvoir rencontrer l'homme avec une réputation de monstre… Enfin bon… Après avoir été secoué et tourner dans tous les sens, ils s'arrêtèrent. Dommage, elle avait commencé à prendre goût à ce petit manège amusant. La porte arrière s'ouvrit, laissant voir quatre hommes armés jusqu'aux dents. Fujiko leur fit un magnifique sourire, ayant le corps de travers et le menton contre le sol, totalement impossible de se redresser. Rien que par ce sourire, certains étaient déjà sous son charme, mais les autres leur firent rappeler qui elle était et tout de suite, le charme avait disparu. Elle soupira en se faisant prendre tel un sac à patates et envoyé dans les douches. Oh oui ! Ils avaient au moins le respect et la bonté de la laver. Les bras totalement libres de mouvement, une fois dans la douche, elle « rassura » les gardes en leur disant qu'elle allait se laver seule pour éviter qu'ils aient peur de se faire dévorer. Une fois la douche finie, elle fut emmenée dans une chaise roulante, attachée de nouveau, vers un aquarium plus grand que celui de l'animalerie, mais fermé en haut. Tant pis, au moins elle pouvait nager tranquillement.

Elle ne fut jamais seules, quelques curieux s'amusaient à venir la voir nager dans l'étendue d'eau. La grâce qu'elle dégageait dans chacun de ses mouvements faisait croire qu'elle dansait. Elle aimait bien avoir tous ses regards sur elles, des regards hypnotisés, mais pas comme celui de son ancien vendeur. Elle observait chaque visage en essayant de voir si le fameux gérant allait venir, en vain. Ce n'était que de petits gardes qui ne l'intéressaient guère.

Elle resta plusieurs jours dans cet aquarium sans sortir une seule fois et il fallait bien avouer que l'eau commençait un peu à désirer. Elle aurait bien voulu qu'on lui change, elle n'aimait vraiment pas vivre dans la saleté. Par chance, après avoir charmé un garde, il lui nettoya son aquarium et changea son contenu pendant que la demoiselle dévorait un magnifique hybride qui devait être issu d'un rongeur. Elle n'avait pas entendu des pas arriver derrière elle, croyant qu'à cette heure si, personne ne viendrait la voir, il était beaucoup trop tard et elle ne pensait pas que le fameux Vladimir viendrait un jour.